Licenciement abusif : le barème « Macron » écarté par la cour d’appel de Paris

Le barème d’indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse créé par les ordonnances « Macron » de septembre 2017 n’a pas quitté les prétoires et fait toujours débat, comme le montre l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 16 mars 2021. Comme dans les précédentes affaires, était en cause la conformité de ce barème aux textes internationaux, et plus particulièrement à la convention 158 de l’OIT qui exige une indemnisation appropriée du salarié dont le licenciement est injustifié.

La possibilité d’écarter le barème dans certains cas…

Dans deux avis rendus en juillet 2019 en formation plénière, la Cour de cassation, après le Conseil d’État (CE 7-12-2017 n° 415243), a conclu à la compatibilité du barème prévu à l’article L 1235-3 du Code du travail avec l’article 10 de la convention 158 de l’OIT qui est d’application directe (Avis Cass. 17-7-2019 nos 19-70.010 et 19-70.011 : RJS 10/19 n° 563). Cela n’a pas empêché certaines cours d’appel, après avoir également reconnu cette conventionnalité, d’écarter son application au cas par cas en fonction des circonstances de l’espèce en exerçant leur contrôle « in concreto », lorsque son application ne permet pas d’assurer une réparation adéquate aux salariés injustement licenciés (CA Reims 25-9-2019 n° 19/00003 : RJS 11/19 n° 627 ; CA Grenoble 2-6-2020 n° 17/04929 : RJS 8-9/20 n° 411).

… admise aujourd’hui par la cour d’appel de Paris

Alors qu’une précédente décision de la cour d’appel de Paris ne le laissait pas nécessairement présager (CA Paris 30-10-2019 n° 16/05602 : RJS 1/20 n° 14), celle rendue en mars par cette juridiction s’inscrit dans cette ligne. Elle accorde en effet à une salariée dont le licenciement économique a été déclaré sans cause réelle et sérieuse une indemnité à ce titre d’un montant supérieur au plafond prévu par le barème en fonction de l’ancienneté et de l’effectif de l’entreprise.

L’arrêt est aussi intéressant en ce qu’il fournit un exemple d’appréciation du préjudice subi.

L’entreprise comptant plus de 11 salariés à la date du licenciement le 13 octobre 2017, la salariée, ayant moins de 4 ans d’ancienneté, pouvait prétendre, aux termes de l’article L 1235-3 précité, à une indemnité d’un montant compris entre 3 et 4 mois de salaire brut, soit, sur la base d’un salaire moyen de 4 403,75 € mensuels, à une somme oscillant entre 13 211,25 et 17 615 €. Les juges ont estimé ce montant insuffisant à assurer une indemnisation adéquate et appropriée compte tenu de la situation concrète et particulière de la salariée, de son âge (53 ans à la date de la rupture et 56 ans à la date du jugement), de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi au vu de sa formation et de son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies. Ils lui allouent alors une indemnité de 32 000 €. Si cette somme est moindre que les 39 636 € réclamés, elle représente un peu plus de 7 mois de salaire. Elle correspond à peu près à la perte de revenus subie entre le licenciement et août 2019, date de l’appel, compte tenu de l’allocation de sécurisation professionnelle et des allocations de chômage perçues pendant cette période.

Suivez les dernières actualités en matière sociale et assurez la relance d’activité pour vos clients ou votre entreprise avec Navis Social :

Vous êtes abonné ? Accédez à votre Navis Social à distance.

Pas encore abonné ? Nous vous offrons un accès au fonds documentaire Navis Social pendant 10 jours.


CA Paris 16-03-2021 n° 19/08721