Une semaine de jurisprudence sociale à la Cour de cassation
Exécution du contrat
La cession de l’entreprise en redressement judiciaire arrêtée par le tribunal de commerce entraîne le transfert d’une entité économique autonome conservant son identité et, par voie de conséquence, la poursuite par le cessionnaire des contrats de travail des salariés attachés à l’entreprise cédée. Il ne peut être dérogé à ces dispositions que lorsqu’en application des articles L 631-22 et L 642-5 du Code de commerce, le plan de redressement prévoit des licenciements pour motif économique qui doivent intervenir dans le délai d’un mois après le jugement. Le jugement arrêtant le plan doit indiquer le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées, d’où il suit qu’une liste nominative des salariés licenciés ou repris par le cessionnaire n’a pas à être dressée et serait en toute hypothèse dépourvue d’effet (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-19.454 F-D).
Paie
Un salarié ne peut être pris en compte pour l’assujettissement de son employeur au versement de transport (devenu versement mobilités) que si son lieu effectif de travail, à l’exclusion de l’établissement auquel il est rattaché, se situe dans le périmètre où est institué ce versement (Cass. 2e civ. 12-5-2021 n° 20-14.887 F-P).Il résulte de la combinaison de l’alinéa 6 et du dernier alinéa de l’article L 2333-67 du Code général des collectivités territoriales dans sa rédaction applicable au litige que si le versement de transport (devenu versement mobilités) est applicable de plein droit au taux fixé par l’établissement public, en cas d’extension du périmètre de transports urbains résultant de l’extension du périmètre d’un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) doté de fiscalité propre, sur le territoire des communes intégrées dans ce dernier, le taux du versement, qui prend effet à la date du 1er janvier ou du 1er juillet qui suit l’entrée en vigueur de l’arrêté portant approbation de l’extension du périmètre de l’EPCI, n’est opposable aux assujettis situés sur le territoire des communes nouvellement incluses qu’après leur avoir été communiqué par l’organisme de recouvrement au plus tard le 1er décembre ou le 1er juin de l’année considérée (Cass. 2e civ. 12-5-2021 n° 20-14.992 F-P).
Epargne salariale
Ayant relevé que l’article 6 des accords de participation conclus au sein du groupe prévoit que les sommes inscrites en comptes courants bloqués dans la réserve spéciale de participation portent intérêts à un taux qu’il définit et que ces intérêts sont calculés à compter du premier jour du quatrième mois suivant la clôture de l’exercice au titre duquel la participation est attribuée, la cour d’appel en a déduit à bon droit que le fait générateur des intérêts est l’inscription des sommes en comptes courants, de sorte que les sommes réintégrées dans la réserve spéciale de participation étaient productives d’intérêts, selon le taux et les modalités déterminés par l’article 6 précité, à compter de la date de réintégration de ces sommes dans la réserve spéciale de participation (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-13.715 F-D).
Rupture du contrat
Un salarié ne peut pas invoquer le principe d’égalité de traitement pour revendiquer les droits et avantages d’une transaction conclue par l’employeur avec d’autres salariés pour terminer une contestation ou prévenir une contestation à naître (Cass. soc. 12-5-2021 n° 20-10.796 F-P).La violation par le salarié des engagements pris sur l’honneur est constitutive, à elle seule, d’une faute grave (Cass. soc. 12-5-2021 n° 20-14.699 F-D).L’agression verbale commise par le salarié résultant de son état pathologique, conséquence du harcèlement moral dont il était victime, la cour d’appel a pu en déduire que ce comportement ne constituait ni une faute grave rendant impossible le maintien de l’intéressé dans l’entreprise, ni une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. soc. 12-5-2021 n° 20-10.512 F-D).Ayant constaté que la plainte déposée auprès du procureur de la République par le salarié était fondée sur les éléments contenus dans les courriels adressés par ce dernier à ses supérieurs hiérarchiques, par lesquels il n’avait signalé que des actes pouvant s’apparenter à des dysfonctionnements ou à un manque de rigueur dans l’application des procédures, sans faire apparaître qu’ils pouvaient révéler des actes de corruption, la cour d’appel a pu en déduire que son licenciement n’était pas nul de plein droit (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-20.911 F-D).Ayant constaté que le salarié, cadre au sein d’une banque, avait été soumis à un interrogatoire éprouvant de 9 heures le jour de la remise de sa lettre de mise à pied et que l’employeur avait, de façon gravement fautive, multiplié les informations qui avaient été diffusées auprès d’organismes financiers et ainsi obéré l’avenir de l’intéressé en portant atteinte à sa réputation et à son honneur, la cour d’appel a caractérisé le comportement fautif de l’employeur ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant du licenciement (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-24.722 F-D).
Représentation du personnel
La proportion de femmes et d’hommes composant chaque collège électoral doit figurer dans le protocole préélectoral en fonction des effectifs connus lors de la négociation du protocole. A défaut, elle est fixée par l’employeur en fonction de la composition du corps électoral existant au moment de l’établissement de la liste électorale, sous le contrôle des organisations syndicales (Cass. soc. 12-5-2021 n° 20-60.118 F-P).Il résulte de l’article R 2314-24 du Code du travail, qui prévoit que lorsque la contestation porte sur la régularité de l’élection ou sur la désignation de représentants syndicaux, la déclaration n’est recevable que si elle est faite dans les 15 jours suivant cette élection ou cette désignation, que celui qui saisit le tribunal d’instance, avant les élections, d’une demande d’annulation du protocole préélectoral, est recevable à demander l’annulation des élections à venir en conséquence de l’annulation du protocole préélectoral sollicitée (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-23.428 F-P).Le conseil de prud’hommes qui a caractérisé l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant le dépassement, durant les mois de janvier et février 2019, par le salarié de son crédit d’heures de délégation, en raison de l’absence de plusieurs membres du comité d’établissement, dont celle du trésorier adjoint en arrêt maladie, a pu en déduire que l’obligation de l’employeur au paiement d’une provision n’était pas sérieusement contestable. Il a en outre exactement retenu que le refus de l’employeur de payer au salarié les heures de délégation supplémentaires, qui ne se heurtait à aucune contestation sérieuse, causait un préjudice collectif à la profession représentée par le syndicat (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-21.124 F-D).L’existence du risque grave justifiant le recours à une expertise doit être appréciée au moment de la délibération du CHSCT. Par conséquent, ne donne pas de base légale à sa décision le président du tribunal judiciaire qui annule l’expertise décidée par le CHSCT par délibération du 15 octobre 2019 après avoir constaté que l’incendie survenu dans l’usine Lubrizol de Rouen le 26 septembre 2019 a produit, dans un premier temps, un large nuage de fumée, qui s’est étendu sur plus de 20 km, puis a entraîné, dans un second temps, des retombées de suie, et qu’il est avéré que de très nombreux produits toxiques ont brûlé lors de cet incendie et, notamment, des hydrocarbures aromatiques polycycliques et que de nombreuses personnes présentes sur le périmètre impacté par le nuage de fumée se sont plaintes de troubles et de gênes (Cass. soc. 12-5-2021 n° 20-12.072 F-D).Dès lors qu’il résultait de ses constatations que le processus décisionnel relatif au regroupement et au déménagement des salariés du site de Paris Daumesnil sur ce nouveau site de Villejuif était acquis et que les sociétés convenaient que le projet serait à terme un grand projet immobilier ayant pour effet de générer une redistribution significative des espaces de travail et de leur usage pour les salariés concernés, le président du tribunal ne pouvait pas annuler la délibération du CHSCT portant désignation d’un expert (Cass. soc. 12-5-2021 n° 19-24.692 F-D).
Statuts particuliers
Selon l’article L 723-11 du CSS dans sa rédaction applicable au litige, l’assuré assujetti au régime d’assurance vieillesse des avocats qui ne justifie pas d’une durée d’assurance fixée par l’article R 723-37, 3 du même Code à 60 trimestres, a droit à une fraction de l’allocation aux vieux travailleurs salariés en fonction de cette durée. En ne prévoyant le versement à l’assuré qui ne justifie pas d’une durée d’assurance de 60 trimestres, durée significative au regard de la durée d’une carrière professionnelle, que d’une fraction de l’allocation aux vieux travailleurs salariés, manifestement disproportionnée au regard du montant des cotisations mises à sa charge au cours de la période de constitution des droits, ce dispositif, dit “clause de stage”, s’il contribue à l’équilibre financier du régime de retraite concerné, porte une atteinte excessive au droit fondamental garanti en considération du but qu’elle poursuit, et ne ménage pas un juste équilibre entre les intérêts en présence. Dès lors, l’application des articles L 723-11 et R 723-37, 3 du CSS doit être écartée (Cass. 2e civ. 12-5-2021 n° 19-20.938 FS-PR).La présentation directe au public d’un produit par un athlète à l’occasion de diverses manifestations et notamment, d’exhibitions sportives, avec ou sans compétition, entre dans le champ d’application de la présomption de salariat des mannequins prévue par les articles L 7123-3 et L 7123-4 du Code du travail. Une cour d’appel ne saurait donc retenir que la relation entre la société qui exploite le nom et la renommée des sportifs recevant compensation financière dans ce cadre est de nature commerciale, et que cette seule compensation ne peut suffire à permettre une requalification de ladite relation en une relation de travail telle qu’elle existe entre un employeur et un salarié alors que les conventions litigieuses emportaient pour les athlètes concernés l’obligation, moyennant rémunération, de porter les équipements de la marque en vue d’en assurer la promotion à l’occasion de diverses manifestations, de sorte que ces contrats étaient présumés être des contrats de travail de mannequin, et qu’il appartenait à la société de renverser cette présomption en apportant la preuve de l’absence de lien de subordination (Cass. 2e civ. 12-5-2021 n° 19-24.610 FS-P).
Contrôle – contentieux
Ayant relevé que la nullité de la mise en demeure reconnue par l’Urssaf et acquise aux débats, privait de fondement l’obligation au paiement des sommes qui en font l’objet, la cour d’appel en a exactement déduit que celle-ci ne pouvait pas solliciter l’examen du bien-fondé dans leur principe des redressements contestés (Cass. 2e civ. 12-5-2021 n° 20-14.510 F-D).
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