Une recherche sur le placement probatoire des conjoints violents
Isabelle Rome, haute fonctionnaire à l’égalité femmes/hommes, a commencé la réunion en rappelant que le placement probatoire avec contrôle judiciaire renforcé des auteurs de violences conjugales est né des réflexions menées par le groupe de travail Justice initié dans le cadre du Grenelle sur les violences au sein du couple. Il permet d’assurer un suivi strict et un accompagnement psychologique des conjoints violents, tout en leur imposant une obligation de résider dans un lieu déterminé, avant tout jugement.
Michel Daccache, adjoint au chef de bureau, a présenté ensuite le travail du Laboratoire recherche et innovation de la Direction de l’Administration Pénitentiaire (le Lab). Pour lui, le recueil des connaissances sur le terrain et dans les services déconcentrés est essentiel pour la performativité des mesures mises en place : « Nous avons un rôle de médiation entre le monde scientifique et celui de la justice. Et nous avons une mission de diffusion et de valorisation des résultats de recherche. »
C’est dans cette logique que le projet recherche et évaluation du placement probatoire s’inscrit. Les chercheurs missionnés vont agréger les retours de terrain en vue de l’amélioration de l’accompagnement et du suivi des conjoints violents, afin d’assurer, le cas échéant, la pérennisation du dispositif en cours d’expérimentation à Nîmes et Colmar. Ils seront en constant dialogue avec les Services pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) locaux et les associations partenaires : La Cordée, ESPOIR et le CSAPA l’Argile, respectivement à Nîmes et Colmar.
Ariane Amado, chargée du projet placement probatoire au sein du Lab, a rappelé les objectifs, la méthodologie et le cadre déontologique de l’étude, avant de présenter l’équipe de chercheurs, divisée en deux volets : sociologique et judiciaire.
L’équipe des chercheurs déployés se compose de :
- deux sociologues : Mathieu Trachmam, chercheur à l’INED, coresponsable de l’unité « Genre, sexualité et inégalités » et de Mathias Dambuyant, sociologue ayant récemment soutenu sa thèse « Veiller sur et punir. Expériences du bracelet électronique en France, en Belgique et en Suisse. »
- deux professeures en Droit à l’Université de Paris Nanterre : Raphaële Parizot, professeure en Droit privé et sciences criminelles et Audrey Darsonville, professeure en Droit privé et sciences criminelles ; ainsi que la Doctorante Julia Delannoy, réalisant une thèse sur la circonstance aggravante des violences conjugales.
La recherche portera principalement sur la nature même du dispositif (à titre présentenciel -juge d’instruction ou JLD- ou comme aménagement ab initio de la peine- tribunal correctionnel- ou à titre post-sentenciel- jap-) surses modalités d’application et son impact- en termes de prévention de la récidive, de prise en charge de la violence des personnes concernées et de protection de la famille et des enfants..
Un temps d’échange avec les représentants de chacun des deux sites expérimentaux et les chercheurs a permis de faire émerger d’autres pistes de recherches, au plan pratique comme au plan juridique. Il a été rappelé que ce dispositif doit trouver un équilibre entre l’accompagnement et le contrôle pour sa réussite.
Concernant les prochaines échéances, un point étape sera réalisé au mois de juin, pour une publication des résultats accompagnée d’un livrable de recommandations fin 2021.
Isabelle Dréan-Rivette, magistrate détachée à l’administration centrale, à la section des politiques de prise en charge au sein du département des parcours de peine, a conclu la séance en appuyant sur la volonté d’agir et de réussir de la DAP. C’est le sens même de la loi et son imbrication dans la réalité qui est questionné ici, se référant à Edgar Morin, pour qui la loi doit traduire une complexité du réel.
Pour aller plus loin Prise en charge des auteurs de violences conjugales