Cabinet Philippe ALLIAUME

Avocat à la Cour d'appel de Paris

Assurance vie en unités de compte : sanction du défaut de conseil

Le manquement d’un assureur ou d’un courtier à son obligation d’informer, à l’occasion d’un arbitrage, le souscripteur d’un contrat d’assurance vie libellé en unités de comptes sur le risque de pertes présenté par un support d’investissement, ou à son obligation de le conseiller au regard d’un tel risque, prive ce souscripteur d’une chance d’éviter la réalisation de ces pertes. Si ces pertes ne se réalisent effectivement qu’au rachat du contrat d’assurance vie, quand bien même le support en cause aurait fait antérieurement l’objet d’un désinvestissement, le préjudice résultant d’un tel manquement doit être évalué au regard, non de la variation de la valeur de rachat de l’ensemble du contrat, mais de la moins-value constatée sur ce seul support, modulée en considération du rendement que, dûment informé, le souscripteur aurait pu obtenir, jusqu’à la date du rachat du contrat, du placement des sommes initialement investies sur ce support.

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Contribution aux charges du mariage : l’apport en capital toujours exclu

Dans cet arrêt d’espèce, la Cour de cassation réaffirme une solution établie depuis 2019 selon laquelle sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.

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Transposition des dispositions sur la garantie de conformité : ouverture d’une consultation publique

On sait que la loi DADDUE a habilité le Gouvernement à transposer par ordonnance (avant le 4-10-2021) deux directives qui visent essentiellement à adapter la garantie de conformité à l’ère numérique et à renforcer la protection des consommateurs (Loi 2020-1508 du 3-12-2020 art. 1 : BRDA 1/21 inf. 29) :

  • – la directive UE 2019/770 du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de fourniture de contenus et de services numériques. Ce texte étend la garantie de conformité à ces contrats, lorsqu’ils sont conclus entre un professionnel et un consommateur, moyennant le paiement d’un prix ou la fourniture de données personnelles. Il couvre l’essentiel des modes d’utilisation (téléchargement momentané ou définitif, streaming) du contenu numérique (films, jeux, applications, etc.) et des services (cloud, médias sociaux, etc.). Rappelons que la garantie de conformité est aujourd’hui réservée aux contrats de vente de biens meubles corporels?;
  • – la directive UE 2019/771 du 20 mai 2019 relative à certains aspects concernant les contrats de vente de biens, abrogeant la directive 1999/44/CE du 25 mai 1999. Ce texte reprend l’essentiel des règles sur la garantie légale de conformité déjà posées par la directive de 1999, qu’il enrichit de dispositions destinées à assurer une meilleure effectivité de cette garantie.

Un avant-projet d’ordonnance en ce sens vient d’être rendu public. Il est accompagné d’une « note de couverture » en précisant la portée.

La DGCCRF et la direction des affaires civiles et du sceau du ministère de la justice ont soumis ces documents à une consultation publique, visant à recueillir les observations des parties prenantes (professionnels, consommateurs, associations de consommateurs et fédérations professionnelles représentatives, professionnels du droit). La consultation est ouverte jusqu’au 9 avril 2021 inclus.

Rappelons que les deux directives précitées du 20 mai 2019 doivent en principe être transposées au plus tard le 1er juillet 2021, pour une application au plus tard le 1er janvier 2022. 

Maya VANDEVELDE

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https://www.economie.gouv.fr/consultation-publique-reforme-garantie-legale-conformite

Le préjudice résultant de la perte injustifiée de l’emploi ne peut pas être réparé deux fois

La Cour de cassation admet la possibilité pour des salariés d’engager une action en responsabilité extracontractuelle à l’encontre d’une société qui n’est pas leur employeur si celle-ci a commis des manquements ou des actes préjudiciables ayant contribué à la dégradation des résultats de leur employeur et aux licenciements qu’ils ont subis, en application du droit commun de la responsabilité civile (notamment : Cass. soc. 28-9-2010 n° 09-41.243 F-D : RJS 12/10 n° 897 ; Cass. soc. 8-7-2014 n° 13-15.845 FS-D : RJS 10/14 n° 676 ; Cass. soc. 24 mai 2018 n° 16-22.881 FS-PB : RJS 8-9/18 n° 530). Tel était le cas en l’espèce.

Une action contre une banque reconnue responsable de la déconfiture de l’employeur

Des salariés licenciés pour motif économique après le placement en redressement judiciaire de leur employeur étaient intervenus dans une instance devant la juridiction commerciale introduite par les commissaires à l’exécution du plan de cession pour demander réparation du préjudice causé par un établissement bancaire. Il était reproché à celui-ci d’avoir accordé des crédits ruineux à l’entreprise en partie à l’origine de ses difficultés. Même si l’article L 622-20 du Code de commerce accorde le monopole des actions collectives aux organes de la procédure collective, une telle action des salariés est, selon la chambre criminelle de la Cour de cassation, recevable dès lors qu’elle est étrangère à la reconstitution du gage commun des créanciers et tend à la réparation de préjudices spécifiques liés à la perte d’emploi (Cass. com. 2-6-2015 n° 13-24.714 FS-PBR : RJS 10/15 n° 633), cette possibilité d’action ayant été consacrée par la chambre sociale (Cass. soc. 14-11-2007 n° 05-21.237 FS-PB : RJS 1/08 n° 22 ; Cass. soc. 8-7-2014 n° 13-15.845 FS-D précité).

Rappelons que la juridiction prud’homale n’est pas compétente pour statuer en responsabilité contre un tiers lorsque la qualité de coemployeur de celui-ci n’est pas invoquée (Cass. soc. 24-5-2018 n° 16-22.881 FS-PB : RJS 8-9/18 n° 530).

La responsabilité de la banque dans la déconfiture de la société employeur a, ici, été reconnue, ouvrant la voie à la réparation du préjudice subi par les salariés. Dans un tel cas, ces derniers peuvent notamment prétendre à la réparation de leur préjudice constitué par la perte de leur emploi (Cass. soc. 8-7-2014 n° 13-15.470 FS-PB : RJS 10/14 n° 703).

Des salariés néanmoins déboutés de leur demande de réparation

En l’espèce, les intéressés avaient précisément identifié leur préjudice à la perte de leur emploi et à ses effets : perte de rémunération à venir, perte d’une chance de retrouver un emploi faute de formation qualifiante. La cour d’appel les a toutefois déboutés de leur demande d’indemnisation au motif que ce préjudice avait été déjà réparé par le versement de l’indemnité de licenciement et l’octroi par la juridiction du travail d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en raison du manquement de l’employeur à son obligation de reclassement et de l’insuffisance du contenu du plan de sauvegarde de l’emploi (une telle insuffisance ne pouvant, rappelons-le, entraîner la nullité des licenciements en cas de procédure collective ouverte contre l’employeur). La motivation fondée sur l’indemnité de licenciement est jugée erronée par la Cour de cassation qui relève que cette dernière, étant la contrepartie du droit de l’employeur de résilier unilatéralement le contrat de travail (en ce sens déjà : Cass.2e civ. 11-10-2007 n° 06-14.611 FS-PB), n’a pas le même objet. Mais ce vice n’entraîne pas de cassation parce que l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse a, en revanche, pour objet de réparer le préjudice du caractère injustifié de la perte de l’emploi. Or un même préjudice ne peut être réparé deux fois.

A noter : On peut penser que la solution ainsi retenue ne rend pas vaine toute action en responsabilité contre un tiers responsable lorsque le licenciement est jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse. Il se peut en effet que les dommages-intérêts alloués à ce titre soient limités dans leur montant par l’application du barème « Macron » ou que l’application du plafond de garantie de l’AGS ne permette pas d’obtenir le règlement intégral des dommages-intérêts alloués. Dans ces situations, l’action indemnitaire dirigée contre le tiers conserverait encore un intérêt. Il se peut aussi que les salariés justifient d’un préjudice spécifique distinct de celui que répare l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. On peut en outre observer à cet égard que l’évaluation du préjudice faite par les prud’hommes ne s’impose pas dans le litige opposant les salariés à un tiers devant la juridiction commerciale. Ce tiers ne peut en effet se prévaloir, dans ce litige distinct, de l’autorité de chose jugée de la décision du juge prud’homal car ces instances n’opposent pas les mêmes parties et n’ont pas la même cause.

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Cass. soc. 27-1-2021 n° 18-23.535 FP-PRI