Cabinet Philippe ALLIAUME

Avocat à la Cour d'appel de Paris

Autres lieux, autres usages.

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Un autre lecteur m’adresse son témoignage d’une audience devant un tribunal de commerce charmant au demeurant:…

« Changeons un peu de décor car à force de moquer gentiment les juridictions d’Oil, on en oublierait un peu de parler de celles d’Oc.

Ah ces charmants petits tribunaux de commerce qui subistent dans des endroits où le développement économique n’est pas toujours à la hauteur de leurs espérances.

Récit d’une DCP au soleil.

En ce qui concerne l’audience, elle est fixée informatiquement par le commis greffier. Ls moyens sont ce qu’ils sont, et l’urgence pas toujours compatible avec le fait de notifier préalablement une ordonnance de roulement au premier président de la Cour d’Appel.

Une fois la DCP remplie, il faut trouver la «chambre du conseil» dans laquelle se tiendra l’audience. Après quelques recherches, on trouve un bureau où se serrent déjà 6 personnes.

Quatre sont en robe noire. Deux à un bureau devant lequel on prend place et deux assis derrière dans un coin sur des chaises et qui ne participeront pas à la discussion. Revenons aux deux qui sont devant. L’un assez grand, anime et guide la discussion, oriente la procédure, questionne le débiteur, fixe des dates et des formalités. Le second plus effacé, pose quelques questions et prend des notes. Vous aurez identifié sans peine que le premier est le commis greffier et le second le président du tribunal. Les deux derrières sont sans doute des assesseurs.

Reste deux spectateurs, tous deux en civil, l’un à coté du débiteur, l’autre derrière. A son discours, le débiteur comprendra que son voisin était le procureur qui avait sans doute enlevé sa robe rouge pour ne pas l’effrayer. Le sixième spectateur restera un inconnu, mais bon, au moins il avait l’accent local, ce n’était pas un estranger.

Son exposé fait, et la LJ demandée, le débiteur s’entend annoncer que le Tribunal va en délibérer et qu’il est invité à sortir. Il se retire donc du bureau, et peu habitué aux usages locaux, tient ouverte la porte afin de permettre, pensait-il, au greffier et au parquet de sortir également sur ses talons. Un peu gêné de se trouver le seul debout et dehors, la main sur la porte, il lance un euh … et se voit répondre .. et bien fermez la porte, on vous a dit qu’on délibère… Ah ben oui, se dit-il in petto, remarquez 3 juges + 1 greffier et 1 procureur ça aurait pu faire un nombre impair, mais là .. il reste le visiteur mystérieux, ils sont 6, j’aurais peut-être dû rester aussi .. pour l’imparité.

Finalement, pour faire suite à une observation du greffier, le délibéré sera prolongé d’une bonne semaine en attendant des renseignements complémentaires.

Mais il ne faut pas pour autant perdre de temps, et dès le lendemain, une semaine avant le vidage du délibéré, le débiteur sera contacté par le mandataire liquidateur et l’administrateur judiciaire, les deux entendant faire leur prise de possession de mission le jour même, ce qui aura le mérite d’apprendre au débiteur que visiblement sa demande de LJ a été « convertie » en un RJ et que si en ce qui le concerne, il doit attendre une semaine pour connaître l’issue du délibéré, l’AJ et le MJ eux, la connaissent déjà. Voyez comme on est injuste quand on accuse ces auxiliaires de faire trainer.

Mais tout est bien qui finit bien, une semaine après, le droit a bien voulu coller au fait, et la décision du tribunal s’aligner sur un RJ commencé depuis sept jours. Et pour rassurer le lecteur, le « 6eme spectateur » n’était ni l’AJ ni le MJ, ni le repreneur futur, mais un stagiaire du Parquet qui n’a pas été présenté et n’a pas eu la présence d’esprit de le faire… »

Voilà qui nous change des procédures collectives européennes secondaires…

Chronique d’une justice très ordinaire

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Un fidèle lecteur par ailleurs responsable d’une publication, qui souhaite toutefois resté discret, me fait part de son point de vue sur une audience de juge de proximité quelque part en banlieue parisienne:

« Les grandes juridictions méprisent volontiers cette justice de proximité, de police et d’instance, alors qu’elle est souvent pour le grand public la partie la plus visible de l’institution voire la plus utile.

Dans un Tribunal d’instance, même si la justice se trouve être rendue par un juge de proximité, on ne l’y rend pas moins au nom du peuple français. La salle d’audience ressemble par son ancienneté, sa solennité et son manque d’entretien a beaucoup de salles d’audience d’un pays dont la justice est chroniquement pauvre. A droite siège une greffière, qui est une professionnelle et qui oeuvre avec efficacité, célérité et beaucoup d’humanité face à des justiciables qui, dans cette audience pénale, ne sont que rarement venus de bon coeur.

Là s’arrête malheureusement l’analogie avec la « grande justice ». Le président d’audience est un juge de proximité, et ne porte donc pas la robe de magistrat. Quant au ministère public, on est très loin des grands débats qui agitent le palais sur « l’avantage de menuiserie » que les avocats reprochent aux membres du parquet. Au tribunal de police, le ministère public est représenté par une commissaire de police, qui siège à côté du président de l’audience. Le justiciable est fondé à penser qu’il a en face de lui deux juges accusateurs, et non pas le représentant du parquet et celui du siège. Nous y reviendrons.

Quelques dizaines de personnes dans la salle, appel des causes, le premier prévenu s’approche, et le ton est tout de suite donné. Le prévenu avait dans l’idée de contester la prévention retenue à son encontre. Le président l’arrête tout net : « Ici Monsieur, vous êtes dans un tribunal pénal, c’est au prévenu de faire la preuve de son innocence et non au tribunal de faire la preuve de sa culpabilité ». Le prévenu, repart, condamné et groggy.

Derrière cette formule à faire bondir n’importe quel juriste, et même, n’importe quel citoyen un peu instruit, se cache sans doute une demi réalité, c’est que les préventions sont établies par des policiers assermentés, et dont les incriminations font foi jusqu’à preuve apportée du contraire. Mais le principe de la présomption d’innocence et d’impartialité du juge n’en sortent pas moins inquiets. On peut bien rire des prévenus trop férus de séries américaines qui appellent le président « votre honneur », mais on voit qu’il n’y a pas que le premier magistrat de France qui confond parfois prévenu et coupable.

Et les dossiers se succèdent, les uns après les autres … interrogatoire d’identité et aussi de revenu, qui agace les prévenus qui ne comprennent pas que cela sert à adapter éventuellement la condamnation à leurs moyens, déclaration du prévenu sur ce qu’il a à dire, réquisitoire souvent très simplifié du ministère public, la parole au prévenu, quelques secondes de silence, et tombe le verdict « le tribunal après en avoir délibéré vous déclare coupable de … et en répression vous condamne à ….. ». Hop, au suivant ..

C’est à la toujours aimable greffière que revient le soin d’expliquer au condamné qui n’a souvent rien compris, ce à quoi il a été condamné, comment s’en acquitter, et pourquoi il a intérêt à s’en acquitter vite et les éventuelles voies d’appel.

Quelques causes bénéficient d’un avocat, ce qui a le double mérite de permettre un début de commencement d’égalité des armes, et aussi de passer en début d’audience, afin de ne pas trop immobiliser les robes noires.

Revenons un instant sur l’avantage de menuiserie. Au tribunal de police du coin, il est exorbitant. Non seulement le « ministère public » est assis à la droite du juge, non seulement il requiert assis là où d’autres qui ne confondent pas siège et parquet requièrent debout, mais il y a mieux encore. Sur la petite centaine de causes de cet après midi là, j’ai noté au moins une dizaine de fois où le policier représentant le ministère public et le président d’audience conféraient à voix basse à l’oreille l’un de l’autre, de manière parfaitement inaudible pour la salle et même pour le prévenu à la barre. Et ce avant de requérir, ou même pendant que le justiciable présente sa défense, qui visiblement n’intéresse pas grand monde. A deux reprises même, le conciliabule a eu lieu pendant la phase qui suit le moment où le prévenu a « parlé en dernier » et le prononcé de la sentence, phase que des gens trop habitués à la « grande justice » pourraient prendre pour le délibéré.

Et l’après midi passe et passe, avec un entraînement qui fait que le ministère public requiert de plus en plus vite, parfois sous forme d’un simple montant, et que le juge condamne à un montant qui va souvent vers la moitié de la réquisition, sauf quand le ministère public, en requérant 150 euros, fait en sorte d’éviter tout appel possible.

Alors chemin faisant, on perd les bons réflexes. En seconde partie d’après midi, apparaît un glissement issu de la volonté d’aller de plus en plus vite. Le ministère public peut alors, sans que personne ne lui en fasse la remarque, ajouter ses commentaires après que le prévenu ait eu la parole en « avant-dernier », et sans qu’on juge utile de la redonner au dit prévenu. Une seule fois, devant l’air un peu interloqué d’un avocat, le président se reprendra et bredouillera .. euh Maître, vous souhaitiez ajouter quelque chose ? L’avocat, qui était entrain de remballer sa robe, n’insistera pas.

A la toute fin de l’après midi, juste avant la condamnation à la chaîne de ceux qui ne se sont pas présentés et ont perdu non pas l’occasion de se défendre, mais celle de voir comment ils sont condamnés, un justiciable fait un peu de la résistance. Il vient volontairement car il conteste la rédaction d’un PV de police qu’il estime renfermer lui-même sa propre contradiction. Le ministère public sort de son propre dossier un rapport manuscrit, le montre discrètement au président d’audience et en confère aimablement avec ce dernier. Le prévenu demande à pouvoir en prendre connaissance, au nom de l’égalité des armes et du contradictoire. Le président le remettra sèchement à sa place « pas question, vous n’aviez qu’à le demander avant ». Allez hop, réquisitoire, condamnation, et que ça saute … Ledit prévenu qui avait eu la faiblesse de croire ce qu’on lui racontait quand il suivait les cours de l’Ecole Nationale de la Magistrature, en rit encore. Après avoir tenté deux fois un poli « je me suis mal exprimé », puis un « je me suis mal fait comprendre » il constatera qu’il n’est pas invité au conciliabule parquet-siège et en restera là.

Voilà ce qu’est une après midi dans un petit tribunal d’une ville toute proche de Paris. Rien de bien grave, et les prévenus qui étaient là, très souvent pour des infractions routières ou de voisinage, le dernier inclus, n’étaient sans doute ni tous innocents ni tous de bonne foi. Mais ce genre de tribunal se devrait aussi d’être un lieu de pédagogie de la justice, qui applique la vieille maxime « tout ce qui mérite d’être fait mérite d’être bien fait ».

NDLR : Même si la justice semble prendre quelques libertés avec le contradictoire, nous avons souhaité respecter la contradiction et avons adressé le projet de cette chronique au président dudit Tribunal, afin de lui proposer de s’exprimer à ce sujet.Il a malheureusement du décliner notre offre, en nous écrivant qu’il était « au regret de devoir indiquer qu’il était réticent à cet exercice tant les questions de justice sont complexes et pour être évoquées sérieusement, justifient d’y consacrer beaucoup de temps, ce dont je ne dispose malheureusement pas» . Nous ne pourrons donc vous faire connaitre sa position, ni par interview ni par droit de réponse. « 

Mais comment fais-tu pour te mettre dans un état pareil ?

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Un lecteur qui, si il était magistrat aurait pu s’appeler Casamayor m’écrit un billet d’humeur que je ne résiste pas à vous faire lire car le sérieux, relatif, de ce blog n’excluant pas une petite récréation, le blog expérimente l’hébergement de quelques billets d’humeur de plumes invitées….

« Commençons par le commencement, la mise en état. Au TGI, ou à la cour d’appel, une mécanique bien huilée, avec souvent un magistrat qui en est chargé et qui peut brandir une ordonnance de clôture qui ferait rentrer de vacances le plus procrastinateur des avocats. Mais ce qui se déroule harmonieusement de relais en relais au TGI est parfois plus .. sportif devant les TC. Enfin devant chaque TC, puisque, ce blog l’a souligné, les TC ont souvent la marotte de réécrire le code de procédure, et même à l’intérieur de ce qui fut la Seine, le vocabulaire change, et les habitudes aussi. A l’ouverture de l’audience, presque tout le monde est déjà habillé, à l’exception de quelques petits nouveaux et nouvelles qui se risquent à encourir l’invitation du président à aller se rhabiller ailleurs. Le greffier est prêt à dégainer les affaires nouvelles car, il s’est astucieusement renseigné auprès d’un des juges pour savoir si le président commencerait par les affaires nouvelles ou les renvois.

Sonnerie, entrée plus ou moins solennelle du tribunal, l’audience est ouverte et « Monsieur l’huissier veuillez appeler les affaires venant pour renvoi simple ». Et voilà un greffier bon pour déplacer à toutesitesse 30 kilogs de dossiers en gromellant in petto « mais ils ne pourraient pas se décider une bonne fois pour toutes ? « 

Enfin, les affaires sont appelées, et se croisent à la barre ou a proximité deux, trois, quatre avocats ou plus. Oublions d’ores et déjà toute habitude de mettre le demandeur d’un côté, et le défendeur de l’autre. Chacun arrive du côté où était son banc et n’en demandons pas plus. Vous pensez que cela gène le juge qui aimerait savoir qui est en demande. Oui, mais il n’est pas le seul à s’interroger.. Bon, alors, Maître, vous êtes en demande ou en défense ?? Ben euh ??? Regard implorant le potentiel contradicteur .. ah toi non plus tu ne sais pas. Bon, attendez, je vais regarder ma liste…

Un ange passe …. il y a d’ailleurs toutes sortes d’anges qui passent dans les TC. Mais si tous ont des plumes, certains qui provoquent un peu trop le greffier chargé de la régularité des opérations se font parfois .. voler dedans. Ben non, ma petite, une stagiaire avocate, sans robe, ce n’est pas une avocate, alors si tu veux représenter quelqu’un il te faut un pouvoir spécial, pas une procuration d’un autre avocat. Habitués, les juristes qui font discrètement de la représentation à titre habituel, dégainent spontanément leur pouvoir et leur carte d’identité, afin de se faire remarquer le moins possible, on ne rigole pas avec ça.

Autre type d’ange qui passe, la personne physique venue elle-même dans ce monde qu’elle connait mal et dans lequel elle pense qu’elle va être jugée. Bien entendu, elle a regardé tous les bons feuilletons et n’a soigneusement rien communiqué à son contradicteur pour faire un meilleur effet de surprise. Ou elle essaiera de raconter le fond de son histoire à un tribunal chargé de mettre en état quelques centaines de dossiers en deux heures, et se heurtera à un refus incompréhensible pour elle. La seule chose qu’elle retiendra c’est qu’elle doit revenir un mois plus tard, mais .. pourquoi faire, aucune idée.

Mais pendant ce temps là, petite récréation chez les avocats, pris de court lorsque le cours normal des choses redémarrent.

– Bon alors Maître, que souhaitez-vous ?

– Je demande la radiation pour défaut de diligence demandeur.

– (sourire carnassier du juge ) vous êtes sur, Maitre ?

– Mais oui, cela fait quatre fois que vous renvoyez pour conclusions demandeur en vain !

– (sourire fatigué du juge ) : Maitre, le demandeur c’est vous .

– (sourire affolé de l’avocat) : Ah .. euh .. alors .. remise pour conclure ..

Le temps passe, les esprits se fatiguent et s’achauffent. Et le siège n’est pas plus que la barre à l’abri de quelques boulettes.

– Bon, allez, ce dossier a assez duré, vous irez en solution devant le présisent Truc décrète le président.

– Mais M. Président, j’aurais souhaité un renvoi pour répliquer.

– Non, allez ouste, solution.

– Mais Monsieur le Prédient dit une petit voix sortant d’un rabatchiffonnée, je suis en demande et je ne suis pas en état.

– Euh.. euh… bon, ben remise pour répliquer.

Et ca dure, ca dure et la chaleur monte, conduisant certains à s’endormir discrètement sur leur bancs. Mais ne vous méprenez pas, si le micro sommeil des avocats et un sujet de plaisanterie pour les juges qui les observent du haut de l’estrade, la situation n’est pas toujours idéale pour les avocats qui tentent d’éviter du regard l’asseseur qui somnole sur l’estrade.

Alors pour se distraire, chacun cède à ses petites marottes. Ca y est, zut, voilà l’obsédé des calendriers qui monte. Vent de panique chez certains mandataires qui se demandent, après avoir échappé à la tournée de vente de calendriers de leur facteur, comment ils vont pouvoir éviter de se faire asséner un calendrier de procédure. Aie aie aie on aurait du réviser notre dossier et savoir où on en est, mais bon .. depuis le temps qu’on s’en passait .. Allez espérons que cela va tomber sur un autre .. oui .. ouf, c’est bon . encore un mois de gagné. Mais l’laerte a été chaude. Faudra que je pense à demander ce que c’est que ce truc. On ne sait jamais.

Bon, revenons aux choses sérieuses. Ce dossier là, on ne me la fait pas, je l’ai regardé.

– M. le Président, je soiuhaite respectueusement soulever l’incompétence ratione loci de votre tribunal

– (le président , hilare): Ah non, Maître, cela ne va pas être possible.

– Mais, M. le Président, je vous assure, il y a un vrai problème de compétence que je dois pouvoir soulever ..

– (le président toujours hilare): Maître, c’est vous qui êtes en demande en qui avez assigné devant nous.

– ah .. (replis stratégique )

Et puis de temps à autre, passage d’un confrère de province, car vous l’aurez compris, ces anecdotes totalement fictives et pour lesquelles toute ressemblance ne serait que le fruit du hasard se passent en Ile de France. Aie, le pauvre est venu avec dossier de plaidoirie et même son client à l’audience .. de mise en état. Comment ca-ton faire pour lui expliquer gentiment qu’avec des rôles bien plein, on ne plaide pas directement …. et comment vat-il faire vis à vis de son client qui a fait 1000 kilomètres pour rien ?

Ah voici la distraction de l’après midi. Très énervé car déjà venu pour rien, ce confrère sollicite la jonction de trois dossiers.

(Président) Oui, Maitre, mais il n’y en a que deux au rôle d’aujourd’hui ( la troisième est au rôle du mois prochain).

(Avocat) mais vous m’avez déjà dit ca la dernière fois, où il n’y avait qu’une des trois affaires.

(Président) ben oui, justement, et là je vous propose un renvoi à un mois, comme ça toutes vos affaires y seront.

(Avocat) : Ah non, ca a asez dure je demande un bref renvoi, à quinzaine.

(Président) Mais Maître ..

(Avocat) : Moniseur le Président, renvoyez moi à quinze jours.

(Président tentant de masquer un début de fou rire contageiux avec ses assesseurs) : revoi à deux semaines.

et deux semaines plus tard, devinez ..

Mais n’en concluez pas qu’une audience ne serait drôle que vue de l’estrade. Vue de la barre, il y a aussi de savoureux moments quand par geste ou mimiques, le greffier, gardien de la régularité, tente respectueusement de faire comprendre au président que là cela ne va pas être possible.

Ah ces présidents tellement pressés de joindre deux affaires qu’ils ne laissent même pas le temps à l’huissier de l’appeler.

Le greffier, changé en statue de sel, se bloque et attend que l’affaire soit efffectivement appelée. Ou pris par une compétition tout ce qu’il y a de plus officieuse sur la durée de l’audience, s’apprête à lever l’audience, au grand désespoir des affaires renvoyées en fin d’audience et de l’huissier qui se demande ce qu’il va devoir en faire.

Et ne parlons pas de quelques juges un peu « geeks », qui inquiètent inutilement les avocats quand ils arborent un rictus ennuyé ou une grimace féroce, dont les plaidants imaginent à tort qu’elle s’adresse à eux ou à leur dossier, alors que la grimace ne s’adresse qu’à ce $*%è »à de micro-ordinateur/tablette/laptop qui bugge au mauvais moment.

Mais tout ceci ne saurait masquer la grande famille des auxiliaires de justice, qui en toute confraternité n’hésitent pas à venir substituer au pied très levé un confrère ou une consoeur qui a disparu dans une faille spatiotemporelle, pas plus que d’expliquer posément à une partie en personne ce qu’elle n’a visiblement pas compris.

Etonnez vous après des marathons pareils que certains se retrouvent à côté de .. leur rabat (voir photo en annexe). Il y a de quoi en perdre sa verticale .. ou se mettre en (mauvais) état.

Et pourtant, derrière ces rituels d’apparence surranée, ces petits ratés du quotidien, le tout ne marche pas si mal, et a largement fait ses preuves.

Avant d’automatiser, d’informatiser et de déshumaniser tout cela à grands coups d’investissement informatiques dont tout le monde est sûr que cela finira par marcher un jour, mais personne ne sait vraiment quand n’oublions pas de humer le parfum de ces salles d’audience et d’en écouter le bruit feutré. On ne sait jamais. »

Les femmes d’Unterbäch

En 1957, les premières Suissesses ont voté dans le village d’Unterbäch, illégalement. Face aux protestations des hommes, leurs votes n’ont jamais été comptabilisés. En 2009, notre journaliste Gaby Ochsenbein s’était entretenue avec certaines d’entre elles. Non, elle n’était pas allée voter à l’époque, mais ses sœurs l’ont fait, dit une femme âgée dans la rue du village. «Il y avait des journalistes et des caméras partout, se souvient une femme aujourd’hui âgée. J’étais enceinte: pour moi, c’était trop, toute cette agitation.» Le local de vote est une petite maison au milieu du village, abritant aujourd’hui la petite fromagerie «Milchhitte». «Au premier étage, c’est là que nous avons voté», explique Rosa Weissen. Rosa Weissen a été la première présidente (maire) de cette commune de 440 habitants qui fut il y a 64 ans au centre de l’attention internationale. Même le New York Times avait parlé de ce vote historique. Attendre le coucher du soleil La votation portait sur un service…