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Coronavirus (Covid-19) : Application des mesures relatives au non-paiement des loyers et des factures d’eau et d’énergie 

1. En novembre dernier, le Parlement a prévu la suspension temporaire des sanctions applicables en cas de défaut ou de retard de paiement des loyers professionnels et des factures d’eau et d’énergie pour les entreprises dont l’activité économique est affectée par les mesures de police administrative prises pour endiguer l’épidémie de Covid-19 (Loi 2020-1379 du 14-11-2020 art. 14 : BRDA 23/20 inf. 26 n°s 6 s. ; voir aussi La Quotidienne du 14 décembre 2020).

Les bénéficiaires de cette protection devaient être définis par décret. C’est ainsi qu’un décret relatif aux bénéficiaires des dispositions de l’article 14 de la loi 2020-1379 du 14 novembre 2020 et « portant sur les loyers et charges locatives » vient d’être publié (Décret 2020-1766 du 30-12-2020). Malgré son intitulé restrictif, ce décret s’applique, à notre avis, pour les mesures de l’article 14 visant tant les loyers et les charges locatives que les factures d’eau, d’électricité et de gaz.

Le dispositif, on le rappelle, est entré en vigueur rétroactivement à compter du 17 octobre 2020 (Loi 2020-1379 art. 14, VII).

2. Le nouveau décret précise que ne peuvent bénéficier de la protection que les entreprises en deçà des seuils de salariés et de chiffre d’affaires (ci-dessous) qui définissent la catégorie des PME par opposition à la catégorie des entreprises de grande taille ou de taille intermédiaire (BRDA 19/20 inf. 10) ; les entreprises de cette dernière catégorie sont donc exclues du dispositif.

Par ailleurs, ne sont visées que les mesures administratives prises à compter du 17 octobre 2020 (n° 5).

Effectif salarié de l’entreprise

3. Pour bénéficier de la protection, l’entreprise doit avoir un effectif inférieur à 250 salariés au premier jour d’application de la mesure de police administrative, cet effectif étant calculé selon les modalités de l’article L 130-1, I du Code de la sécurité sociale. Si l’entreprise est une association, elle doit avoir au moins un salarié.

Lorsque « l’entreprise locataire » contrôle ou est contrôlée par une autre personne morale (au sens de l’article L 233-3 du Code de commerce), c’est l’effectif global des entités liées qui est pris en compte. Visant la seule hypothèse de l’entreprise locataire, cet élargissement de la prise en compte de l’effectif salarié en cas de contrôle n’est applicable, à notre avis, qu’aux défauts de paiement des loyers des baux professionnels et non des factures d’eau et d’énergie, sauf à établir pour ces factures une distinction injustifiée selon que l’entreprise est locataire ou non de ses locaux d’exploitation.

Chiffre d’affaires de l’entreprise

4. Le chiffre d’affaires constaté lors du dernier exercice clos de l’entreprise doit être inférieur à 50 millions d’euros ; pour les activités n’ayant pas d’exercice clos, le chiffre d’affaires mensuel moyen doit être inférieur à 4,17 millions d’euros.

La condition relative au chiffre d’affaires doit être considérée au premier jour où la mesure de police administrative s’applique.

Contrairement au seuil de salariés, le chiffre d’affaires est apprécié entreprise par entreprise, qu’elle soit contrôlée ou contrôlante.

Perte de chiffre d’affaires subie par l’entreprise

5. Pour les mesures de police administrative prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire déclaré le 17 octobre 2020 (second confinement), l’entreprise doit avoir perdu au moins 50 % de son chiffre d’affaires sur le mois de novembre par rapport au chiffre d’affaires de référence, celui-ci étant déterminé comme indiqué dans le tableau ci-dessous selon la date de création de l’entreprise.

Pour les entreprises ayant fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public, le chiffre d’affaires du mois de novembre 2020 n’intègre pas les ventes à distance avec retrait en magasin ou livraison.

La perte de chiffre d’affaires est appréciée entreprise par entreprise, que celle-ci soit contrôlée ou contrôlante.

Date de création de l’entreprise

Chiffre d’affaires de référence

Entreprises créées avant le 1-6-2019

CA du mois de novembre 2019 ou, si l’entreprise le souhaite, CA mensuel moyen de l’année 2019

Entreprises créées entre 1-6-2019 et le 31-1-2020

CA mensuel moyen réalisé entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020

Entreprises créées entre le 1-2-2020 et le 29-2-2020

CA réalisé en février 2020 et ramené sur un mois

Entreprises créées depuis le 1-3-2020

CA mensuel moyen réalisé entre le 1-7-2020, ou à défaut la date de création de l’entreprise, et le 30-9-2020

Justificatifs

6. Les entreprises fournissent à leurs bailleurs, fournisseurs d’eau, de gaz ou d’électricité ou d’énergie ou, le cas échéant, au juge saisi une déclaration sur l’honneur qu’elles remplissent les conditions précitées et y joignent tout document comptable, fiscal ou social justifiant du nombre de salariés et du montant du chiffre d’affaires ; la perte de chiffre d’affaires est établie sur la base d’une estimation.

Les entreprises de moins de 50 salariés bénéficiaires de l’aide dispensée par le fonds de solidarité pour novembre 2020 peuvent se contenter de produire l’accusé de réception de leur demande d’aide pour ce mois, accompagné des documents comptables ou fiscaux justifiant du respect du seuil de chiffre d’affaires.

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Décret 2020-1766 du 30-12-2020 : JO 31 texte n° 35

La mise en oeuvre de l’ordonnance de protection

« Protéger la victime, ce n’est pas la victimiser mais lui permettre de reprendre sa vie en main ». C’est en ces termes qu’Ernestine Ronai, présidente du comité national de l’ordonnance de protection a inauguré, le 6 janvier 2021, le comité de pilotage pour la prise en charge judiciaire des violences conjugales et intrafamiliales au tribunal judiciaire de Charleville- Mezières, en présence d’Isabelle Rome, haute-fonctionnaire à l’égalité femmes/hommes, des deux chefs de cour, Jean-Baptiste Parlos et Hugues Berbain et de Gwen Keromnes, magistrate délèguée à la politique associative et à l’accès au droit.

Cette nouvelle instance a été conçue à partir des travaux menés depuis novembre 2020 au sein de la cour d’appel de Reims, démontrant la nécessité de mettre en œuvre une politique transversale pour mieux lutter contre ces violences et l’intérêt majeur de s’appuyer, à cette fin, sur des projets de juridiction.

Animés de cette volonté, Vivien David, président du tribunal judiciaire de Charleville-Mézières et Laurent de Caigny, procureur de la République près le dit tribunal, ont ainsi constitué un comité de pilotage qui réunit l’ensemble des acteurs intervenant dans ce domaine.

La participation des représentants des forces de l’ordre, de l’éducation nationale, de la santé, du service pénitentiaire d’insertion et de probation, de la protection judiciaire de la jeunesse, du barreau et des huissiers de justice, du département, du secteur associatif spécialisé dans l’aide aux victimes, l’accompagnement des femmes ou l’hébergement d’urgence, ou encore le contrôle judiciaire des auteurs ainsi que  celle de la déléguée départementale aux droits des femmes à la réunion inaugurale de cette nouvelle instance témoignent de la mobilisation de toutes et tous et de leur détermination à agir ensemble. Les magistrats du siège et du parquet y étaient nombreux, signe de la réalité d’un engagement collectif de la juridiction dont la directrice de greffe, Aurélie Deloux est aussi pleinement impliquée, à l’instar des agents travaillant au sein de ce tribunal.

Au coeur des priorités du dispositif, figure le développement de l’ordonnance de protection. Un protocole a été signé en ce sens, afin de garantir une pro-activité de la réponse judiciaire et de fluidifier l’échange d’informations entre les parties et les différents intervenants à la procédure. Divers documents comme une requête simplifiée ou une trame d’ordonnance de fixation de date d’audience ont été également élaborés.

Et si Arthur Rimbaud, l’enfant du pays, disait que « l’amour est à réinventer », il n’est pas aujourd’hui interdit de penser, dans la grande salle d’audience des années soixante de ce tribunal des bords de la Meuse que la justice est en train de se ré-inventer. Parce que seule elle ne peut rien contre le fléau des violences intrafamiliales, et que l’institution toute entière a pris conscience que sauver des vies passe par un volontarisme de chaque instant mais aussi par la structuration d’un partenariat solide et structuré. Un possible espoir pour toutes les victimes, y compris sur le territoire le plus pauvre de France qu’est celui des Ardennes. Mais pas le moins inventif et ô combien solidaire !