Catégorie : Suisse

«Nous sommes confrontés à une nouvelle guerre froide»

Thomas Greminger, ancien secrétaire général de l’OSCE, voit dans l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le début d’une nouvelle guerre froide. Selon lui, il faudra aussi de plus en plus compter avec des guerres par procuration. Pour Thomas Greminger aussi, l’invasion fut une surprise. En tant que médiateur de longue date entre la Russie et l’Ukraine, il connaît des personnes de haut rang des deux côtés. Il était convaincu qu’une analyse rationnelle des coûts et des bénéfices rendrait une telle guerre improbable. Thomas Greminger a officié à partir de 2010 comme ambassadeur de Suisse auprès de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). À l’époque de l’annexion de la Crimée en 2014, la Suisse assurait la présidence de l’organisation, ce qui lui a permis d’effectuer un important travail de médiation. Une percée fut l’accord sur une mission d’observation permanente, qui a toutefois récemment pris fin. De 2017 à 2020, Thomas Greminger a été secrétaire général…

En France, un duel Macron – Le Pen déjà vu, mais pas déjà gagné

Le résultat du premier tour de l’élection présidentielle française sous la loupe de la presse suisse. Sans grande surprise, l’affiche du second tour de l’élection présidentielle en France, le 24 avril prochain, sera la même qu’en 2017. Dimanche, le président sortant Emmanuel Macron est arrivé en tête avec près de 28% des voix, devant la candidate d’extrême droite Marine Le Pen (plus de 23%). Ce lundi, la presse suisse souligne le bon score du locataire de l’Élysée, à la fois meilleur que prévu par les sondages et meilleur qu’il y a cinq ans – une performance que seul le socialiste François Mitterrand avait réussi à accomplir en 1988. Mais c’est aussi un résultat en demi-teinte pour celui qui avait promis, lors de son élection, de tout faire pour qu’il n’y ait plus de «raison de voter pour les extrêmes» en France. Certes, les premiers sondages pour le second tour le donnent victorieux. Mais la partie est loin d’être jouée, préviennent la plupart des journaux. Une des enquêtes…

La Suisse se dirige-t-elle vers une alliance de sécurité européenne?

Alors que la guerre en Ukraine fait rage, des appels à une plus grande coopération militaire sont lancés en Suisse. Jusqu’à quel point le petit pays peut-il fléchir sa fameuse neutralité? L’Europe se réarme. De nombreux pays estiment que l’agression russe et la guerre en Ukraine ont fondamentalement modifié la situation sécuritaire de l’ensemble du continent. En Suisse aussi, les partis bourgeois et la Commission de la politique de sécurité du Conseil national demandent plus de moyens pour l’armée. Fabio Wasserfallen, professeur de politique européenne à l’Université de Berne, a récemment mené, en collaboration avec d’autres scientifiques, un sondage pour le compte de Tamedia. La guerre en Ukraine semble certes inquiéter la population, mais la majorité des Suisses se sentent relativement en sécurité dans le pays. 45% estiment que la Suisse doit s’armer, 41% pensent que ce n’est pas nécessaire, 8% veulent désarmer et 6% sont indécis. Le groupe de réflexion Avenir Suisse, proche…

Quand la Suisse tente de donner un horizon à sa recherche

L’abandon des négociations sur l’accord-cadre entre l’Union européenne et la Suisse a exclu la Confédération de programmes de recherche cruciaux. Le gouvernement est alors intervenu en octroyant des subventions transitoires aux scientifiques et start-ups. Berne mise aussi sur de nouveaux partenariats avec plusieurs pays hors UE. Sera-ce suffisant? Le point dans une perspective à long terme. Charlotte Laufkötter venait d’entamer ses études quand les chercheurs et chercheuses suisses ont obtenu leurs premiers fonds de l’Union européenne en 2004. Presque deux décennies plus tard, l’UE a limité drastiquement l’accès de la Suisse à Horizon Europe, le plus vaste programme de financement international. Résultat, Charlotte Laufkötter est l’une des dernières scientifiques à pouvoir en bénéficier. Chercheuse en biochimie marine à l’Université de Berne, elle a obtenu en janvier dernier un prestigieux Starting Grant du Conseil européen de la recherche (ERC). Cette subvention de 1,5 million…

Le patrimoine, l’autre victime collatérale des guerres

Les populations civiles ne sont pas les seules à être menacées par les conflits armés; les biens culturels également. Quoique protégé par une législation spécifique, le patrimoine peut même être intentionnellement pris pour cible. Sur la place d’armes de Chamblon, dans le canton de Vaud, des jeunes gens portant des gilets blancs ou rouges et des membres de la protection civile s’affairent. Ils déplacent, observent, photographient, répertorient des objets visiblement calcinés. Heureusement, il ne s’agit que d’un exercice de sauvetage d’une collection patrimoniale organisé par la Haute École ARC Conservation-restauration (HE-ARC CR). Les treize étudiantes et étudiants qui y participent apprennent à agir comme si le sinistre avait eu lieu dans un musée, une bibliothèque ou un service d’archives. Il s’agit par exemple de procéder à un tri entre les objets irrémédiablement perdus et ceux qui pourraient être conservés en vue d’une restauration. L’Ukraine protège ses trésors Ce type…

Le droit populaire le plus radical en sommeil

Dans sept cantons suisses, les citoyennes et citoyens peuvent révoquer leurs autorités. Un droit qui sert essentiellement de soupape de sécurité. Et c’est peut-être pour cette raison qu’il demeure dans l’ombre de l’initiative et du référendum. La Suisse serait alors secouée par une «révolution permanente», une «anarchie organisée» dominerait le pays: telles étaient, en 1846, les mises en garde du Conseil constitutionnel bernois. Lequel réagissait à la proposition des radicaux d’introduire le droit de révoquer le Grand Conseil. Quelque 8000 électeurs devaient pouvoir demander la dissolution du Parlement et son renouvellement. Si le quorum était atteint, le peuple était appelé à se prononcer sur cette requête. Aujourd’hui, sept cantons connaissent un droit de révocation. Contrairement à ce que craignaient ses détracteurs, ce droit populaire n’a pas entraîné de «révolution permanente». Depuis son introduction, il demeure dans l’ombre. Le système politique de la Rome antique…

Lutte anti-mafia: la «défense passive» qui fait encore défaut à la Suisse

Entre la révision du Code pénal et la mise en œuvre de mesures administratives ciblées, la pression judiciaire et policière sur les mafias s’accroît en Suisse. Cependant, il manque une base de données policière commune et d’autres mesures de surveillance qui permettraient de lutter contre l’infiltration de la mafia dans les secteurs économiques les plus attractifs. Journaliste indépendante vivant entre la Suisse et l’Italie, Madeleine Rossi couvre depuis des années le crime organisé italien. Elle a publié en 2019 un rapport sur la présence des mafias italiennes en Suisse et en 2021 le livre «La mafia en Suisse – Au cœur du crime organisé». La Suisse plaît à la mafia, on ne le répétera jamais assez, mais pourquoi au juste? Le procureur milanais Pasquale Addesso y a répondu très simplement en novembre 2021, au lendemain de la double opération «Nuova Narcos Europea – Cavalli di razza»: «La Suisse est un territoire très important. Certains personnages liés à la ‘ndrangheta ont…

Kiwix, l’outil suisse qui déjoue la censure russe

Le logiciel suisse Kiwix permet de copier des sites web entiers pour les rendre accessibles hors ligne. Alors que Wikipédia risque des sanctions en Russie en raison de ses contenus sur la guerre en Ukraine, les téléchargements de l’encyclopédie via Kiwix battent des records. L’encyclopédie participative Wikipédia est l’une des rares sources d’information sur la guerre en Ukraine encore non censurée en Russie, mais elle est dans le collimateur du Kremlin. Dès le 1er mars, Wikimedia, la fondation américaine qui héberge Wikipédia, «a reçu plusieurs avertissements du gouvernement russe (…) demandant la suppression d’informations vérifiées et factuelles dans des articles», indique une porte-parole dans un e-mail à swissinfo.ch. L’organe russe de régulation des communications Roskomnadzor reproche notamment à Wikipédia des pages parlant d’«invasion russe en Ukraine», alors qu’il est illégal de dévier de la terminologie officielle selon laquelle il s’agirait d’une «opération militaire…

Pourquoi les élections cantonales n’intéressent plus

Lors des dernières élections bernoises, moins d’un tiers du corps électoral s’est rendu aux urnes. C’est très peu pour des élections cantonales, mais ce n’est pas exceptionnel. Car le peuple se mobilise pour ce qui est très grand ou ce qui est très près. Les cantons se situent exactement entre les deux. Explications. Le canton de Berne vient d’élire son gouvernement et son parlement avec une participation de moins de 32%! Pire encore, ce chiffre n’émeut presque personne, parce qu’on ne s’attendait pas à autre chose. Que s’est-il passé? La moitié participe au cas par cas Les recherches sur la participation le montrent depuis des années: en Suisse, il n’est plus de règle que le peuple se fasse un avis sur tout et n’importe quoi. Cela n’est simplement pas possible – selon les études – avec autant d’élections et de votations aux trois niveaux de l’Etat: Confédération, cantons et communes. La perception de la participation comme un devoir n’est plus de mise. On la tient plus pour un…

L’invasion russe en Ukraine met en évidence les lignes de fracture de l’ONU

Les nations occidentales condamnent unanimement la guerre menée par la Russie en Ukraine. Mais, dans d’autres parties du monde, la guerre a mis en lumière des lignes de fracture et des allégeances changeantes, ce qui pourrait avoir un impact plus large sur la politique mondiale et les Nations Unies, notamment à Genève. Si l’Europe, les Etats-Unis, le Canada, l’Australie et le Japon ont fermement condamné la guerre de la Russie en Ukraine, de nombreuses nations n’entendent pas choisir leur camp. A l’instar de la Chine, de l’Inde, des Etats du Golfe et de nombreux pays africains. Mais, au cours des différents votes de l’ONU sur ce conflit (voir encadré), certains ont changé de position. Les Emirats arabes unis et le Sénégal, par exemple, se sont d’abord abstenus, puis ont voté en faveur de la condamnation de la Russie. La Chine et l’Inde, pour leur part, se sont systématiquement cantonnées dans l’abstention. A l’Assemblée générale de l’ONU, les 193 pays membres de l’organisation…