L’employeur ne peut pas imposer à un salarié une modification de son contrat de travail à titre disciplinaire, telle qu’une rétrogradation (Cass. soc. 17-6-2009 n° 07-44.570 FS-PB). Il doit d’abord lui notifier la proposition d’une telle sanction en l’informant expressément de son droit d’accepter ou de refuser cette mesure (Cass. soc. 28-4-2011 n° 09-70.619 FS-PB ; Cass. soc. 22-6-2011 n° 09-43.321 FS-D). Le salarié qui accepte une rétrogradation disciplinaire peut-il ensuite contester le bien-fondé de cette sanction ? Oui, répond sans réserve la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 avril 2021. À notre connaissance, c’est la première fois que cette question de la portée de l’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire lui est soumise.
L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire a une portée limitée
Dans cette affaire, l’employeur a notifié au salarié une rétrogradation disciplinaire, effective sous réserve que le salarié l’accepte, assortie d’une baisse de sa rémunération contractuelle. Le salarié a accepté cette rétrogradation en signant un avenant à son contrat de travail. Il a ensuite saisi le conseil de prud’hommes pour demander l’annulation de cette sanction et son rétablissement à un poste de qualification et de rémunération équivalentes à son précédent emploi.
La cour d’appel l’a débouté de ses demandes en retenant que le salarié avait retourné l’avenant à son contrat de travail signé et assorti de la mention « lu et approuvé ». L’avenant précisait notamment son nouvel emploi, ses attributions, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail. Pour les juges du fond, c’est donc en parfaite connaissance de cause que le salarié a signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il a ainsi acceptée, de sorte qu’il n’était plus fondé à la remettre en cause.
Or, précise la Cour de cassation, accepter la modification du contrat de travail proposée par l’employeur pour sanctionner un comportement fautif ne vaut pas renonciation du droit à contester la régularité de la procédure disciplinaire et le bien-fondé de la sanction.
Par conséquent, l’acceptation du salarié vise seulement la modification du contrat de travail qu’implique la sanction et ne vaut ni aveu de la faute ni acquiescement à la sanction.
A notre avis : Une renonciation du salarié à contester une rétrogradation disciplinaire est possible en négociant une transaction qui devrait être signée par l’employeur et le salarié après que ce dernier a accepté la modification de son contrat de travail, en prévoyant en contrepartie de cette renonciation le versement par l’employeur au salarié d’une indemnité transactionnelle qui ne doit pas être dérisoire (Cass. soc. 28-11-2000 n° 98-43.635 FS-P).
Le juge conserve son pouvoir de contrôle sur la sanction
La Cour de cassation rappelle également que, en application des articles L 1333-1 et L 1333-2 du Code du travail, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. Il peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.
Saisis de la contestation d’une rétrogradation disciplinaire, même acceptée par le salarié, les juges du fond auraient donc dû examiner la réalité des faits invoqués par l’employeur, leur caractère fautif et la proportionnalité de la sanction prononcée à la faute reprochée au salarié.
Aliya BEN KHALIFA
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Cass. soc. 14-4-2021 n° 19-12.180 FS-P