Cabinet Philippe ALLIAUME

Avocat à la Cour d'appel de Paris

CEDH : l’affaire [I]Luxleaks[/I] et la protection en demi-teinte des lanceurs d’alerte

Eu égard à la marge nationale d’appréciation, le Luxembourg pouvait, sans enfreindre la Convention, condamner un lanceur d’alerte à 1 000 € d’amende pour avoir révélé des informations attentatoires à la réputation de son employeur au motif que les documents divulgués n’avaient apporté aucune information essentielle, nouvelle et inconnue jusqu’alors.

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La juste évaluation du préjudice réparable

La Cour de cassation rappelle que le juge doit se placer au jour de la décision pour déterminer l’étendue du préjudice subi. Elle ajoute que le chef de perte de gains professionnels peut se cumuler avec celui d’incidence professionnelle toutes les fois que la victime parvient à démontrer que son exclusion définitive du monde du travail lui a fait ressentir une dévalorisation sociale.

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La juste évaluation du préjudice réparable

La Cour de cassation rappelle que le juge doit se placer au jour de la décision pour déterminer l’étendue du préjudice subi. Elle ajoute que le chef de perte de gains professionnels peut se cumuler avec celui d’incidence professionnelle toutes les fois que la victime parvient à démontrer que son exclusion définitive du monde du travail lui a fait ressentir une dévalorisation sociale.

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L’acquéreur de parts de SARL n’est pas tenu de libérer le capital social

Une SARL est constituée entre deux associés sans que les apports en numéraire soient libérés en totalité. Après la cession de parts sociales à un tiers, la société est mise en liquidation judiciaire et le liquidateur poursuit l’acquéreur des parts en paiement du solde du capital social non libéré.

La cour d’appel de Paris rejette la demande du liquidateur : à défaut de stipulation contractuelle contraire, l’obligation de libération du capital ne pèse pas sur l’acquéreur de parts d’une SARL mais sur le cédant, cette obligation inhérente à la souscription des parts constituant une dette envers la société indépendante de la cession. Il résulte, en effet, de l’article 1843-3, al. 1 du Code civil que le capital social non libéré constitue une créance de la société contre son associé. En outre, ne sont pas applicables aux SARL les dispositions de l’article L 228-28 du Code de commerce, concernant les actions, aux termes duquel l’actionnaire défaillant, les cessionnaires successifs et les souscripteurs successifs sont tenus solidairement du montant non libéré du capital.

A noter : La solution s’applique à toute cession de parts sociales.

Comme la cour d’appel de Paris, celle de Lyon avait jugé, à propos d’une société civile, que la libération des apports est une dette personnelle non attachée à la détention des parts, qui ne se transmet pas avec elles (CA Lyon 9-6-2005 n° 04-2345 : RJDA 7/06 n° 798). Ces cours d’appel ont ainsi appliqué une jurisprudence ancienne, en vertu de laquelle l’acheteur, en tant qu’ayant cause à titre particulier du vendeur, est un tiers à l’égard des obligations contractées par celui-ci à l’occasion de la chose cédée sauf si, par une disposition expresse, il a déclaré faire son affaire des engagements du vendeur (Cass. req. 3-9-1940 : JCP 1940 II n° 1557 note Becqué). Par exemple, l’acquéreur d’un fonds de commerce n’est pas tenu de l’obligation de non-concurrence souscrite par le cédant (Cass. com. 1-4-1997 n°  95-12.025 P : RJDA 8-9/97 n° 1005 ; Cass. com. 11-3-2014 n° 13-12.507 F-D : RJDA 7/14 n° 596). De même, l’engagement pris par le propriétaire d’un immeuble de réserver des logements aux adhérents d’une association ayant consenti un prêt pour financer leur construction n’est pas transmis au nouvel acquéreur de l’immeuble (Cass. 3e civ. 16-11-1988 n° 88-11.298 P : D. 1989 p. 157 note Ph. Malaurie). 

Néanmoins, il peut être soutenu que l’obligation de libération des parts incombe de plein droit à celui qui a la qualité d’associé au moment où cette obligation devient exigible en se fondant sur l’article 1843-3, al. 5 du Code civil, aux termes duquel l’associé qui devait apporter une somme d’argent et qui ne l’a pas fait devient de plein droit débiteur des intérêts de cette somme à compter du jour où elle devait être payée. L’obligation de libération des parts de SARL devient exigible lors de l’appel de fonds de la gérance (C. com. art. L 223-7) ou de l’échéance prévue dans les statuts ou par une décision des associés. Par exception, l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire rend immédiatement exigible le montant du capital non libéré (C. com. art. L 624-20, L 631-18, L 641-14). Si cette analyse est retenue, l’acquéreur est alors tenu de la dette lorsque la cession est antérieure à la date d’exigibilité de la libération du capital.

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Sociétés commerciales n° 34081


CA Paris 16-2-2021 n° 19/20152

L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire n’interdit pas au salarié de contester la sanction

L’employeur ne peut pas imposer à un salarié une modification de son contrat de travail à titre disciplinaire, telle qu’une rétrogradation (Cass. soc. 17-6-2009 n° 07-44.570 FS-PB). Il doit d’abord lui notifier la proposition d’une telle sanction en l’informant expressément de son droit d’accepter ou de refuser cette mesure (Cass. soc. 28-4-2011 n° 09-70.619 FS-PB ; Cass. soc. 22-6-2011 n° 09-43.321 FS-D). Le salarié qui accepte une rétrogradation disciplinaire peut-il ensuite contester le bien-fondé de cette sanction ? Oui, répond sans réserve la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 avril 2021. À notre connaissance, c’est la première fois que cette question de la portée de l’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire lui est soumise.

L’acceptation d’une rétrogradation disciplinaire a une portée limitée

Dans cette affaire, l’employeur a notifié au salarié une rétrogradation disciplinaire, effective sous réserve que le salarié l’accepte, assortie d’une baisse de sa rémunération contractuelle. Le salarié a accepté cette rétrogradation en signant un avenant à son contrat de travail. Il a ensuite saisi le conseil de prud’hommes pour demander l’annulation de cette sanction et son rétablissement à un poste de qualification et de rémunération équivalentes à son précédent emploi.

La cour d’appel l’a débouté de ses demandes en retenant que le salarié avait retourné l’avenant à son contrat de travail signé et assorti de la mention « lu et approuvé ». L’avenant précisait notamment son nouvel emploi, ses attributions, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail. Pour les juges du fond, c’est donc en parfaite connaissance de cause que le salarié a signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il a ainsi acceptée, de sorte qu’il n’était plus fondé à la remettre en cause.

Or, précise la Cour de cassation, accepter la modification du contrat de travail proposée par l’employeur pour sanctionner un comportement fautif ne vaut pas renonciation du droit à contester la régularité de la procédure disciplinaire et le bien-fondé de la sanction.
Par conséquent, l’acceptation du salarié vise seulement la modification du contrat de travail qu’implique la sanction et ne vaut ni aveu de la faute ni acquiescement à la sanction.

A notre avis : Une renonciation du salarié à contester une rétrogradation disciplinaire est possible en négociant une transaction qui devrait être signée par l’employeur et le salarié après que ce dernier a accepté la modification de son contrat de travail, en prévoyant en contrepartie de cette renonciation le versement par l’employeur au salarié d’une indemnité transactionnelle qui ne doit pas être dérisoire (Cass. soc. 28-11-2000 n° 98-43.635 FS-P).

Le juge conserve son pouvoir de contrôle sur la sanction

La Cour de cassation rappelle également que, en application des articles L 1333-1 et L 1333-2 du Code du travail, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. Il peut annuler une sanction irrégulière en la forme, injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Saisis de la contestation d’une rétrogradation disciplinaire, même acceptée par le salarié, les juges du fond auraient donc dû examiner la réalité des faits invoqués par l’employeur, leur caractère fautif et la proportionnalité de la sanction prononcée à la faute reprochée au salarié.

Aliya BEN KHALIFA

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Cass. soc. 14-4-2021 n° 19-12.180 FS-P