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Licenciement pour absence prolongée : 6 mois pour remplacer une directrice est un délai raisonnable

Le Code du travail interdit à l’employeur de licencier un salarié en raison de son état de santé ou de son handicap, sauf inaptitude physique constatée par le médecin du travail. Toutefois, pour la Cour de cassation, rien ne s’oppose au licenciement motivé, non par l’état de santé du salarié, mais par la situation objective de l’entreprise dont le fonctionnement est perturbé par l’absence prolongée ou les absences répétées de l’intéressé pour maladie. Celui-ci ne peut toutefois être licencié que si ces perturbations entraînent la nécessité pour l’employeur de procéder à son remplacement définitif (Cass. soc. 13-3-2001 n° 99-40.110 FS-PBR : RJS 5/01 n° 592 ; Cass. soc. 2-3-2005 n° 03-42.800 F-D : RJS 5/05 n° 503) par l’embauche d’un nouveau salarié (Cass. soc. 4-6-1998 n° 96-40.308 PB : RJS 7/98 n° 845).

Pour être valable, le remplacement définitif doit en outre intervenir soit avant le licenciement, à une date proche de celui-ci (Cass. soc. 16-9-2009 n° 08-41.879 F-PB : RJS 11/09 n° 849), soit dans un délai raisonnable après la rupture du contrat de travail (Cass. soc. 28-10-2009 n° 08-44.241 FS-PB : RJS 1/10 n° 28).

Dans un arrêt du 24 mars 2021, la Cour de cassation est amenée à se prononcer sur le caractère raisonnable ou non d’un délai de 6 mois pour procéder au remplacement définitif d’une directrice.

Le remplacement définitif doit intervenir dans un délai raisonnable après le licenciement

En l’espèce, une directrice d’association en arrêt maladie depuis moins d’un an est licenciée à raison de la désorganisation de cette structure causée par son absence prolongée et de la nécessité de procéder à son remplacement définitif. Estimant avoir été licenciée en raison de sa maladie, elle saisit le conseil de prud’hommes afin d’obtenir la nullité de la rupture de son contrat de travail.

La cour d’appel l’ayant déboutée de sa demande, jugeant son licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, elle se pourvoit en cassation. À cette occasion, elle fait valoir que la nécessité pour l’employeur de pourvoir à son remplacement définitif à son poste de travail n’est pas établie dans la mesure où celui-ci est intervenu 6 mois après son licenciement alors qu’il aurait dû intervenir à une date proche de la rupture.

Le délai raisonnable est apprécié en fonction du poste à pourvoir et des démarches pour recruter

Rejetant cet argument, la Cour de cassation confirme la décision des juges du fond.

Après avoir rappelé les conditions auxquelles ce licenciement est subordonné – perturbations du fonctionnement de l’entreprise, absence prolongée ou absences répétées du salarié, remplacement définitif de ce dernier – la Cour rappelle les points que les juges du fond doivent examiner pour décider si un nouveau salarié a été recruté dans un délai raisonnable.

Ainsi, ce « délai raisonnable » est apprécié souverainement par les juges du fond en tenant compte des spécificités de l’entreprise et de l’emploi concerné, ainsi que des démarches faites par l’employeur en vue d’un recrutement.

A noter : La solution n’est pas nouvelle. La Cour de cassation juge en effet depuis 2004 que le caractère raisonnable du délai relève de l’appréciation souveraine des juges du fond qui doivent, à cet effet, tenir compte des critères mentionnés ci-dessus (Cass. soc. 10-11-2004 n° 02-45.156 FS-PBRI : RJS 1/05 n° 30 ; Cass. soc. 14-3-2007 n° 06-41.723 F-D).

La Cour de cassation exerce donc un contrôle restreint sur les décisions des juges du fond en la matière. Elle vérifie seulement que les juges ont tenu compte des critères de spécificité de l’entreprise et de l’emploi, et de l’engagement de démarches en vue d’un recrutement pour apprécier le caractère raisonnable du délai.

En l’espèce, la cour d’appel, qui a tenu compte de ces démarches immédiatement engagées par l’employeur et de l’importance du poste de directeur à pourvoir, a pu estimer que le remplacement de la salariée 6 mois après son licenciement était intervenu dans un délai raisonnable.

A noter : Si le délai de 6 mois a pu être jugé raisonnable pour pourvoir un poste de direction, tel n’a pas été le cas, par exemple, pour un poste de secrétaire administratif (Cass. soc. 9-5-1989 n° 88-40.036 F-D). Même solution dans une affaire où un salarié embauché en remplacement d’un contremaître malade avait vu son contrat à durée déterminée transformé en un contrat à durée indéterminée 7 mois environ après le licenciement de ce dernier (Cass. soc. 12-10-2011 n° 10-15.101 F-D : RJS 12/11 n° 977).

Valérie DUBOIS

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Cass. soc. 24-3-2021 n° 19-13.188 FS-PI

Si une assurance-vie est exigée par le prêteur, la prime doit être incluse dans le calcul du TEG

Pour la détermination du taux effectif global (TEG) d’un prêt sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels (C. consom. art. L 314-1 ; ex-art. L 313-1).

En conséquence, lorsque la souscription d’un contrat d’assurance sur la vie est imposée par le prêteur comme condition d’octroi du prêt, la prime d’assurance, qui fait partie des frais indirects, doit être prise en compte pour la détermination du TEG.

Après avoir énoncé ce principe, la Haute Juridiction a cassé la décision d’une cour d’appel qui, pour rejeter la demande de déchéance du droit aux intérêts formée par un emprunteur en raison de l’absence de prise en compte dans le TEG de la première prime du contrat d’assurance sur la vie nanti au profit du prêteur, avait retenu que cette prime ne constituait pas des frais, commissions ou rémunérations dès lors que le souscripteur peut en disposer à l’issue du remboursement du prêt garanti.

A noter : Les frais de garantie du crédit ou le coût des assurances doivent être compris dans le TEG s’ils sont déterminables à la date de conclusion du prêt et si l’octroi du prêt est conditionné à la souscription d’une garantie ou d’une assurance (notamment, Cass. 1e civ. 12-7-2012 n° 11-21.687 F-D : RJDA 12/12 n° 1099 ; Cass. 1e civ. 14-10-2015 n° 14-24.582 F-D : RJDA 3/16 n° 220).

Dans un cas où un contrat de prêt prévoyait le nantissement de trois contrats d’assurance-vie, la Cour de cassation a jugé que la souscription de ces contrats n’avait pas pu être imposée à l’emprunteur par le prêteur puisqu’ils avaient été souscrits antérieurement à la date d’effet du prêt (Cass. 1e civ. 9-7-2015 n° 14-16.951 F-D : RJDA 12/15 n° 858). Elle ne revient pas dans l’arrêt commenté sur cette solution. Ce qu’elle condamne ici, c’est l’argument retenu par la cour d’appel pour refuser d’intégrer la prime d’assurance dans le calcul du TEG, à savoir le fait que l’emprunteur pourra la récupérer une fois son prêt remboursé. Il a déjà été jugé, en effet, que doivent être pris en compte les frais de souscription de parts sociales auprès de l’organisme qui subventionne le prêt (telle une banque mutualiste ou coopérative), même si les parts sont remboursables à l’issue du prêt (Cass. 1e civ. 24-4-2013 n° 12-14.377 :  RJDA 10/13 n° 834).

Pour en savoir plus sur cette question : voir Mémento Concurrence consommation n° 89305 s.


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